![]() ![]() ![]() |
CHAPITRE IV - HAÏTI
I. INTRODUCTION
1. La Commission interaméricaine des droits de l'Homme (“la CIDH” ou la “Commission interaméricaine”) a décidé d’inclure Haïti dans le chapitre IV de son Rapport annuel, en raison du fait que la situation dans ce pays au cours de l’année couverte par ce rapport s’inscrit dans le cadre défini pour l’identification des États membres de l’OÉA dont les pratiques en matière de droits de la personne méritent une attention particulière. Dans le cas d’Haïti, ce cadre inclut les situations structurelles qui affectent sérieusement la jouissance des droits fondamentaux ancrés dans la Convention américaine relative aux droits de l'Homme (la “Convention américaine”) ou la Déclaration américaine des droits et devoirs de l'Homme (la “Déclaration américaine”), et plus spécialement des situations de violence graves qui empêchent l’application régulière de la règle de droit; de graves crises institutionnelles; des processus de changement institutionnel qui peuvent avoir des conséquences négatives pour les droits de la personne; ou de graves omissions dans l’adoption des dispositions nécessaires pour l’exercice effectif des droits fondamentaux. La CIDH a basé son analyse sur l’information obtenue au cours de la visite effectuée en mai 2009; sur des audiences tenues au cours de sa 137e session ordinaire en novembre 2009; sur l’information reçue de différents secteurs de la société civile ainsi que sur d’autres sources fiables accessibles au public. Le 24 novembre 2009, la CIDH a transmis à l’État la copie d’une ébauche de la section actuelle du Chapitre IV et lui a demandé de transmettre ses observations dans les trente jours. En date de la publication de ce rapport, la CIDH n’a pas reçu d’observations de la part de l’État.
2. Tel que mentionné, une délégation de la CIDH dirigée par Sir Clare K. Roberts, en sa qualité de rapporteur de la CIDH pour Haïti, a effectué une visite in loco du 25 au 29 mai 2009.[1] La CIDH exprime son appréciation au gouvernement et au peuple d’Haïti pour le plein appui qui lui a été fourni lors de la réalisation de cette visite. Le but principal de la visite, effectuée conjointement avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), était de recueillir de l’information sur la sécurité des citoyens ainsi que sur la situation des droits de la personne et de la justice applicable aux mineurs, en vue de la préparation de rapports spéciaux sur ces questions. À Port-au-Prince, la délégation a rencontré une série d’acteurs, y compris des représentants du Ministère des Affaires étrangères, du Ministère des Affaires sociales et du Travail, de l’Institut du Bien-être social et de recherches (IBESR), de la Division de protection des mineurs de la Police nationale, de la Direction centrale de la Police judiciaire, de l’Administration pénitentiaire, et du Bureau de la protection des citoyens. La délégation a visité les bureaux de la Mission de stabilisation des Nations Unies en Haïti (MINUSTAH), et a rencontré des représentants du Tribunal pour enfants de Port-au-Prince, ainsi que d’organisations internationales non gouvernementales traitant de questions relatives à la sécurité des citoyens et à la justice applicable aux mineurs en Haïti. De plus, la délégation a tenu une conférence sur la CIDH et le système interaméricain de protection des droits de la personne à l’Université d’État d’Haïti à Port-au-Prince.
3. La délégation a effectué des visites du Pénitencier National, au Commissariat Delmas 33, au Centre de détention pour mineurs de Delmas 33, à la Prison pour femmes de Pétionville et à l’abri Le Carrefour. Le 27 mai 2009, la délégation s’est rendue dans la ville de Gonaïves, où elle a rencontré le commissionnaire du gouvernement, le chef de la police ainsi que des représentants et des organisations de la société civile. À la suite de cette visite, la CIDH a diffusé un communiqué de presse[2] dans lequel elle a exprimé sa grave préoccupation au sujet du surpeuplement et de la situation inhumaine à laquelle étaient exposées les personnes détenues au commissariat de Gonaïves (Toussaint Louverture), en particulier les enfants.[3]
II. CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES
4. En premier lieu, la Commission interaméricaine souligne la réponse de l’État haïtien à sa version préliminaire du Rapport sur Le droit des femmes de vivre libres de violence et de discrimination en Haïti.[4] Les observations faites par l’État au sujet de la version préliminaire du rapport ont été très utiles pour l’analyse de la CIDH, et elles ont été incorporées –selon le cas– dans le rapport, pour ainsi renforcer sa substance et permettre une réflexion plus approfondie de la situation.
5. Nonobstant ce qui précède et comme cela a été observé dans plusieurs rapports sur la recevabilité de requêtes individuelles liées à Haïti dans le passé,[5] la CIDH tient à souligner que l’État n’a généralement pas répondu aux communications envoyées par la CIDH en 2009, qu’elles contiennent ou non des allégations de violations des droits de la personne, des demandes de mesures conservatoires, ou des demandes d’information. L’information reçue par la Commission interaméricaine indique également que l’État ignore uniformément ses recommandations ainsi que les jugements de la Cour interaméricaine des droits de l’homme. Par conséquent, des membres de la société civile ont informé la CIDH que la soumission de pétitions dans le cadre du système interaméricain est vue comme une procédure longue et sans lendemains, et qu’elle n’est donc pas considérée comme un moyen efficace d’obtenir justice en Haïti. De même, des bénéficiaires de mesures conservatoires ont fait savoir à la Commission interaméricaine que la situation de risque pour leurs vies et/ou leur sécurité personnelle subsiste après que ce mécanisme a été accordé par la CIDH.
6. Comme il le sera élaboré plus en détail ci-après, la CIDH reconnaît les conditions économiques sévères dans lesquelles doit opérer l’État haïtien. Cependant, la Commission interaméricaine insiste sur l’importance de pouvoir compter sur une information officielle fiable relativement à certains cas et questions générales afin d’être en mesure de mieux s’acquitter de ses fonctions d’entité de supervision, et également pour coopérer avec les États membres et les aider dans leurs tâches de protection des droits de la personne. À cet égard, la Cour interaméricaine a affirmé que la coopération des États membres représente une obligation fondamentale dans le cadre procédural international établi par le système interaméricain:
L’État contrôle les moyens qui permettent de vérifier les actes qui se produisent sur son territoire. Bien que la Commission ait des pouvoirs d’enquête, elle ne peut les exercer au sein de la juridiction d’un État sans avoir la coopération de cet État.[6]
7. Gardant ceci à l’esprit, la CIDH espère que la réponse de l’État au rapport Le droit des femmes de vivre libres de violence et de discrimination en Haïti puisse représenter un premier pas vers une collaboration renforcée avec les organes du système interaméricain des droits de la personne.
8. La Commission interaméricaine reconnaît les progrès réalisés dans divers secteurs en 2009, notamment la sécurité et la réforme de la police, et elle réitère son engagement et son plein appui à l’État et au peuple d’Haïti en vue du renforcement et de l’amélioration de la collaboration mutuelle, afin de poursuivre les améliorations en matière d’obligations concernant les droits humains en Haïti.
III. PROGRÈS GÉNÉRAL ET PRINCIPAUX ÉVÉNEMENTS EN HAÏTI EN 2009
9. Au cours de 2009, la CIDH a observé des signes de progrès dans des secteurs liés aux droits de la personne en Haïti. La CIDH encourage particulièrement l’État haïtien à maintenir son engagement et ses efforts de renforcement de l’état de droit et des institutions chargées de l’administration de la justice, notamment la Police Nationale d’Haïti (PNH), l’École de la Magistrature et le Tribunal pour Enfants. De même, la Commission interaméricaine appuie fortement les efforts de l’État de promotion du développement économique et social national et note qu’un certain nombre de mesures ont été prises pour encourager l’investissement économique en Haïti. Afin d’obtenir la stabilité dans tout pays, la sécurité doit être accompagnée du développement social et économique.
10. Le 14 avril 2009, la Conférence pour le développement économique et social d’Haïti a eu lieu à Washington, D.C., avec la participation de donateurs internationaux et de membres du gouvernement haïtien.[7] Cette conférence a mené à un accord entre les donateurs et le gouvernement de travailler ensemble pour aborder la question de la réduction de la pauvreté, l’atténuation des dégâts et les priorités de croissance économique identifiées par les Haïtiens. Les donateurs se sont engagés à verser 353 millions de dollars US à l’appui de cette stratégie.[8] Bill Clinton, ancien président des États-Unis, a été nommé envoyé spécial des Nations Unies en Haïti et a demandé aux donateurs de respecter leur engagement à cet égard. De plus, un certain nombre de pays ainsi que le Fonds monétaire international et la Banque mondiale ont approuvé un important allègement de la dette pour Haïti[9] en 2009, ce qui permettra à l’État de concentrer le peu de ressources financières dont il dispose sur des domaines autres que le remboursement de ses dettes.
11. De son côté, l’Assemblée générale de l’Organisation des États Américains a adopté la résolution AG.RES.2487 (XXXIX-O/09) au cours de sa 39e Session ordinaire tenue les 2 et 3 juin à San Pedro Sula, Honduras. Cette résolution appelle au renforcement des mécanismes de coordination au sein de l’OÉA et traite principalement de l’appui au développement socio-économique et à la stabilité politique en Haïti, en vue de maximiser les résultats par des procédures et moyens coordonnés pour la prestation de l’aide. À cet égard, au cours du Cinquième Sommet des Amériques qui a eu lieu à Trinité-et-Tobago et auquel les chefs de gouvernement de 34 pays ont discuté de l’appui international pour Haïti, l’OÉA a été chargée de coordonner la programmation interaméricaine pour appuyer le développement d’Haïti.
12. Du 3 au 6 septembre 2009, le Secrétaire général adjoint de l’OÉA, l’ambassadeur Albert Ramdin, a mené une mission de haut niveau des institutions interaméricaines et de fonctionnaires des États membres en Haïti.[10] La délégation a rencontré un certain nombre de fonctionnaires de l’État et a visité plusieurs projets financés ou exécutés par des institutions participantes afin de se rendre compte de première main de l’impact qu’ont ces projets sur les vies du peuple haïtien. L’ambassadeur Ramdin s’est réjouit de la “période relativement soutenue de stabilité politique et de l’environnement de sécurité amélioré en Haïti” et a manifesté l’espoir que “ce climat unique puisse être utilisé pour créer des emplois, générer des revenus et appuyer la consolidation démocratique”.[11]
13. Le 29 octobre 2009, la stabilité politique d’Haïti a été mise au défi lorsque le Sénat –après une session longue et houleuse – a voté une résolution destituant la Première ministre Pierre-Louis, pour “incohérence dans ses politiques générales” et “manque de résultats”. Les organisations et observateurs internationaux ont exhorté le Président à nommer un nouveau premier ministre aussi rapidement que possible, afin de ne pas perdre de vue les nombreux objectifs fixés au cours de l’année exigeant une stabilité politique. Cependant, le jour suivant, le Président Préval a proposé M. Jean-Max Bellerive, ancien ministre de la Planification et de la Coopération extérieure, pour assumer les fonctions de premier ministre. Le 6 novembre 2009, le Sénat a approuvé cette candidature à l’unanimité par le biais d’une résolution; la Chambre du Congrès a approuvé la candidature le jour suivant, et M. Bellerive a présenté son cabinet la semaine suivante, ce qui a entraîné la formation d’un nouveau gouvernement pour la République, et ce en moins de deux semaines.[12] Cette résolution rapide de la situation reflète un engagement de maintenir la stabilité politique comme fondation afin de mieux renforcer le développement économique.
IV. PRÉOCCUPATIONS CONTINUES DE LA COMMISSION INTERAMÉRICAINE
A. Sécurité des citoyens et impunité pour les violations des droits de la personne
14. L’information reçue en 2009 révèle un consensus de chaque secteur de la société sur une amélioration générale de la situation en matière de sécurité en Haïti.[13] À cet égard, un certain nombre de pays, y compris le Canada et les États-Unis, ont modifié leurs avis aux voyageurs, suggérant que leurs citoyens “fassent preuve de prudence s’ils doivent se rendre en Haïti”, au lieu de l’avertissement précédent d’“éviter tout voyage non essentiel”.
15. Entre autres facteurs, cette amélioration est due aux mesures positives prises en vue de la professionnalisation de la Police nationale d’Haïti. Les Nations Unies ont fait état d’un sondage d’opinion publique qui montrait que 58 pourcent des Haïtiens considèrent qu’il y a eu un changement positif au sein de la PNH.[14] La CIDH reconnaît les efforts concertés de l’État, avec l’appui de la communauté internationale, pour améliorer la PNH et renforcer l’état de droit. Elle insiste également sur l’importance d’adopter des mesures appropriées afin d’assurer la paix et la stabilité à long terme en mettant en place une politique, une stratégie et un plan de sécurité publique pour traiter des facteurs clés qui contribuent à la persistance du crime violent en Haïti. La société civile a manifesté ses graves préoccupations relativement au fait qu’aucune mesure n’est prise concrètement afin de renforcer et stabiliser la situation actuelle, laissant la porte ouverte pour que les gangs se reforment et pour une recrudescence connexe de l’insécurité.[15]
16. Cependant, en dépit des signes de progrès au cours de l’année, la situation de sécurité en Haïti demeure fragile en raison des faiblesses institutionnelles, de la corruption, de l’impunité et de la pauvre qualité des conditions de vie de la majorité de la population. L’information reçue par la CIDH soulève des préoccupations graves dans quelques secteurs particuliers, notamment en ce qui concerne la violence policière et la corruption, l’accroissement de l’agitation civile et la réaction policière correspondante, ainsi que le trafic de drogue.
17. En ce qui concerne la PNH, il convient de noter que 115 inspecteurs de police ont obtenu leurs diplômes en août 2009, et qu’une nouvelle classe de 468 agents de police, dont 153 femmes, ont également obtenu leurs diplômes. Il y a donc un total de 10 600 agents de la PNH pour le pays, ce qui contribue définitivement à l’amélioration de la situation de sécurité. La Commission interaméricaine reconnaît les efforts déployés par l’État, conjointement avec la communauté internationale, pour bâtir un corps de police fort et efficace. Cependant, la CIDH doit soulever la question de la distribution inadéquate du personnel policier à travers le pays. En réalité, la vaste majorité de ces 10 600 agents se trouvent à Port-au-Prince et aux alentours de la capitale. Vers la zone frontière, une zone qui a un grand besoin de contrôle policier, la CIDH a appris qu’il y a seulement environ 100 agents de police responsables de plus de 360 kilomètres de long de frontière. La Commission interaméricaine est très préoccupée par le climat d’insécurité croissante qui règne dans ces zones, qui sont caractérisées par la pauvreté, l’exploitation, les violations des droits de la personne, le désordre et un mouvement constant de personnes, la présence de gangs criminels bien organisés et une absence presque complète de la police.
18. De même, l’information disponible à la CIDH indique également que le nombre d’agents de police affectés à Cité Soleil a été augmenté de 31 à 64.[16] Malgré cette amélioration significative de la situation, le nombre demeure manifestement insuffisant pour assurer pleinement la sécurité et la jouissance des droits de la personne des près de 500 000 habitants de Cité Soleil. Au Commissariat de Delmas 33, qui est également responsable d’une population d’environ 500 000 personnes, la CIDH a été informée que seulement 2 véhicules étaient disponibles durant la journée, ce qui est insuffisant pour assurer le transport pour les appels d’urgence, les patrouilles et le transfert des prisonniers au tribunal. Parallèlement à cette insuffisance de la PNH et au fait que la population manque de confiance dans l’institution, l’information reçue montre que le lynchage continue d’être une pratique largement répandue dans certaines régions, et qu’il n’y a action policière ou judiciaire que dans très peu de cas, ce qui entraîne l’impunité pour les délinquants.[17] La CIDH comprend les difficultés liées à l’enquête sur les cas de lynchages, vu que souvent ils ont lieu dans l’anonymat et avec l’appui des foules, mais elle souligne la nécessité de le faire afin d’envoyer un message très clair à la population que la capacité de demander justice se trouve dans la seule juridiction de l’État. Dans cet ordre d’idées, la Commission interaméricaine souligne à nouveau l’importance de garantir une présence policière dans chaque région du pays, pour refléter l’autorité de l’État partout au pays et pour envoyer un message très clair qu’aucune région n’est sous-priorisée.
19. En dépit des améliorations significatives apportées à la professionnalisation au sein de la PNH, l’information reçue en 2009 indique encore clairement qu’il y a un nombre important de rapports sur la corruption de certains agents de police.[18] La CIDH observe que les arrestations ne sont pas toujours réalisées en accord avec la loi et les procédures applicables; que les personnes ont souvent de la difficulté à obtenir le recours à un tribunal compétent pour décider de la légalité de leur arrestation ou détention; et qu’en dépit des ordonnances de mise en liberté, quelques personnes doivent encore payer pour leur libération.[19] La Commission interaméricaine estime qu’il est fondamental que le processus de présélection de la police continue afin de mettre un terme à la corruption au sein du corps de police. Ce n’est qu’après que la PNH sera en mesure d’exercer le rôle qui lui est confié de faire exécuter la loi et d’éviter d’endommager encore plus l’intégrité et la crédibilité de la police en tant qu’institution.
20. À ce sujet, la CIDH s’est dite préoccupée par le fait que les agents de police qui évoquent l’idée de créer un syndicat au sein de la PNH font l’objet de grave persécution.[20] La CIDH a également appris qu’aucun fonctionnaire de l’État n’est présent aux funérailles d’agents de police tués en service, ce qui pourrait être vu comme un message de manque de support pour sa propre force d’application de la loi.[21] Il faut également noter que le processus de triage (« vetting ») actuellement appliqué par les Nations Unies est vu par certains secteurs comme une autre forme d’intrusion de la part de la communauté internationale dans les affaires haïtiennes. À cet égard, la Commission interaméricaine fait valoir que le processus de triage est effectué à la demande de l’État haïtien lui-même et elle affirme que c’est une étape essentielle vers le rétablissement de la confiance de la population envers la PNH. Par conséquent, la CIDH considère que l’État doit prioriser le processus de triage et publier régulièrement les résultats obtenus.
21. En 2009, la CIDH a constamment reçu de l’information sur les actes de violence et de corruption d’agents de police, en particulier dans les régions de Les Cayes et de Petit-Goâve. Selon cette information, il semblerait que les agents de police dans ces régions s’octroient la latitude de commettre des crimes violents et graves dans un climat d’impunité totale. Pire encore, la CIDH a observé une tendance constante de persécution qui se développe à la suite des dénonciations de ces crimes, qui prend diverses formes qui vont des menaces, du tabassage et des incendies criminels aux meurtres de victimes qui ont décidé de dénoncer leurs agresseurs. D’autre part, les procureurs locaux hésitent soi-disant à poursuivre des plaintes déposées contre des agents de police, de peur d’être persécutés eux-mêmes. L’information indique qu’il y a impunité totale et que les victimes qui osent porter plainte devant les autorités judiciaires contre les auteurs de ces actes sont finalement contraintes de quitter leur ville de résidence parce qu’elles craignent sérieusement d’être assassinées, ce qui amène le peuple haïtien à ne plus se bercer d’illusions au sujet du système de justice pénale.
22. La CIDH a été informée d’un accroissement de la violence policière à l’encontre des jeunes adultes et des adolescents, et a été préoccupée d’apprendre le meurtre de Daniel Darius, un rappeur local également connu sous le nom de Fantom, qui a été supposément tué par des agents de la Brigade d’intervention motorisée (BIM). La CIDH a été particulièrement choquée d’apprendre le décès de l’étudiant Dalus Hetlong, supposément tué par l’agent de police Jean Erick Jean Baptiste sur le campus de l’université, au cours d’incidents qui ont dégénéré à la suite d’une fausse publication sur le site web du Ministère de l’Éducation relativement à l’accès aux examens officiels.[22]
23. Le 19 avril et le 21 juin 2009, des élections sénatoriales ont eu lieu, après avoir été retardées à la suite de troubles politiques et d’une série d’ouragans.[23] Une vaste majorité de la population a boycotté les élections, principalement en raison d’une peur de représailles de la part de partisans du parti politique Fanmi Lavalas,[24] pour éviter des incidents de violence ou par manque général de confiance dans le processus électoral. Le fait que les véhicules privés et les transports publics étaient interdits le jour des élections a également pu être un facteur ayant découragé les électeurs à se rendre dans les bureaux de vote. Le 19 avril, par exemple, moins de 2 % de la population électorale s’est présenté dans les bureaux de vote de la capitale, et un total d’environ 11% dans le pays, alors que le taux de participation aux élections du 21 juin 2009 était d’environ 10%.[25] Le Conseil électoral provisoire (CEP) et des représentants de la communauté internationale ont déclaré que les élections avaient eu lieu dans des conditions normales.[26]
24. En dépit d’un certain nombre de mesures de renforcement de la sécurité, il y a eu plusieurs actes de violence qui ont entraîné des blessures et la mort d’au moins une personne, ainsi que de graves irrégularités, y compris des actes d’intimidation et de fraude. Dans le département du Centre, le CEP a dû repousser l’élection sénatoriale dans plusieurs bureaux de vote, parce que le matériel de vote avait été brûlé par des protestataires et qu’une personne au moins avait été blessée par balle. De plus, la CIDH a appris que certains citoyens n’avaient pas été autorisés à voter parce que leurs noms n’apparaissaient sur aucune liste de votants.
25. À la suite des élections, la session de validation des sénateurs a été retardée de plusieurs semaines, notamment en raison d’accusations de fraude faites par l’ancien vice-président du CEP, ce qui a convaincu de nombreux sénateurs à ne pas assister aux sessions, d’une part, et des règles de procédure interne du Sénat, d’autre part, qui sont assez ambiguës en ce qui a trait au quorum requis pour une telle validation. La session de validation a finalement eu lieu le 4 septembre 2009.
26. La CIDH rappelle qu’il est essentiel que l’État crée des conditions et mécanismes optimaux pour assurer que les droits politiques, tels que consacrés à l’art. 23 de la Convention américaine, peuvent être exercés efficacement, tout en respectant le principe d’égalité et de non discrimination.[27] Bien que la Commission interaméricaine reconnaisse les efforts déployés par l’État et la communauté internationale pour réaliser ces élections de façon démocratique et transparente, le taux de participation reflète un manque d’intérêt inquiétant dans plusieurs régions. De même, quelques-unes des mesures prises, notamment l’interdiction des transports, a sérieusement empêché une part importante de la population d’exercer leurs droits de vote. Tous ces facteurs ont un impact direct sur la confiance que peut avoir la population dans ses représentants, un élément indispensable pour l’établissement de l’état de droit.
27. Les statistiques montrent que les troubles civils se sont accrus depuis 2008. En février 2009 seulement, 64 manifestations ont été signalées dans le pays, dont les deux tiers étaient apparemment motivées par des préoccupations socio-économiques.[28] Des protestations turbulentes et souvent violentes à Port-au-Prince ont fait les grands titres de l’actualité de la fin avril à septembre, elles étaient principalement liées à l’adoption d’une loi qui fixait le salaire quotidien minimum à 200 gourdes (5 $US) et à une réforme de l’Université d’État d’Haïti. Les manifestants étaient principalement composés d’étudiants et de citoyens de banlieues populaires de Port-au-Prince. Ces protestations ont donné lieu à de nombreux épisodes de violence, avec personnes blessées, de nombreuses arrestations et des dommages matériels. Les médias ont également signalé un usage excessif de gaz lacrymogènes et des coups de semonce de la part des autorités, ce qui a entraîné encore plus de blessures. Un bon nombre d’arrestations ont censément été utilisées par les autorités comme un outil de répression et ont été dénoncées par les ONG comme arbitraires et violentes.[29] À la suite d’une décision prise par le Parlement haïtien qui a rejeté les plaintes des manifestants, l’Association des Industries d'Haïti a dû fermer quelques-unes de ses industries pendant quelques jours à la suite d’événements violents lors desquels travailleurs et agents de police ont été battus par les manifestants, et de nombreux véhicules privés et publics ont été endommagés.
28. La réaction de la PNH face aux manifestations civiles en 2009 a été fortement critiquée par les ONG et les médias. En août, la CIDH a reçu de l’information alléguant que des agents de la PNH avaient jeté des gaz lacrymogènes, utilisé des matraques et effectué de nombreuses arrestations pour disperser les manifestants, principalement des employés de Télécommunications d'Haïti S.A.M. (Teleco), de l’Autorité portuaire nationale (APN) et d’Électricité d’Haïti (EDH) récemment mis à pied. La ville de Lascahobas a également été le théâtre d’une série de manifestations liées aux coupures de courant et à la mauvaise distribution d’énergie dans le Département du Centre, avec un solde d’au moins un mort et quelques dizaines de blessés après que des soldats de la MINUSTAH aient essayé de débloquer les barricades non sans se faire arroser de pierres et de coups de feu.
29. Selon cette information, les manifestations ont été caractérisées par des actes de violence ou d’intimidation de la part de certains secteurs de la société qui leur étaient opposés, ce qui a grandement limité l’exercice du droit à la liberté d’expression ou à la liberté de réunion. La CIDH rappelle à l’État haïtien qu’il a l’obligation de garantir effectivement le libre exercice de ces droits, qui ne saurait être limité qu’en conformité avec les restrictions expressément stipulées dans la Convention américaine.
30. Bien que les enlèvements demeurent une source de préoccupation, en date du 27 août 2009, la Police des Nations Unies a enregistré une diminution moyenne de 74 % du nombre des enlèvements cette année par rapport à 2008.[30] La Commission interaméricaine a été préoccupée d’apprendre que des membres d’un gang armé avaient tiré des coups de feu à deux reprises sur un juge d’instruction de Port-au-Prince chargé d’instruire plusieurs cas d’enlèvement.[31]
31. En 2009, la CIDH a été constamment préoccupée par le problème du trafic de drogues, qui continue de menacer la sécurité des citoyens. Selon les rapports de médias, la pratique de contrebande de la drogue par la voie aérienne a augmenté de 53 pourcent au cours des deux dernières années.[32] Les trafiquants de drogue corrompent la police, les juges et les politiciens d’Haïti, ce qui mine les efforts que déploient les communautés internationale et locale pour amener sécurité et stabilité dans le pays. La CIDH demande avec instance aux autorités de renouveler leurs efforts en vue de lutter contre le trafic de drogues et le manque de contrôle le long de la frontière et dans les ports inefficaces.
32. La Commission interaméricaine a également été rendue attentive au fait qu’à Port-de-Paix, le Commissionnaire du gouvernement, Jean-Frédérick Bénêche, avait ordonné l’arrestation d’un journaliste, Kerly Dubréus, directeur de Radio Kon Lambi, qui distribuait de l’information relativement à sa présumée participation au trafic de drogues.[33] L’information reçue indique également que le Commissaire Bénêche a fait fermer une station de radio, Radio Idéale FM, pour « obstruction à la justice », car la station de radio aurait refusée de divulguer une source d’information.[34] Dix jours plus tard, et à la suite de dénonciations massives de la part de journalistes locaux et d’associations de presse internationales qui faisaient valoir les aspects arbitraires de leur arrestation,[35] le journaliste en question a été libéré après une intervention du Ministre de la Justice.[36] À cet égard, la Cour interaméricaine a déclaré:
Lorsque la liberté d’expression d’une personne en particulier est restreinte illégalement, ce n’est pas seulement le droit de cette personne qui est violé mais aussi le droit e tous les autres de "recevoir" des informations et des idées.[37]
33. La CIDH encourage l’État haïtien à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l’exercice de ce droit puisque la “liberté d’expression est la pierre angulaire sur laquelle repose l’existence même d’une société démocratique”[38] et rappelle à l’État Haitien le Principe 8 de la Déclaration de Principes sur la Liberté d’Expression, qui indique que : « Tout communicateur social a droit à la non divulgation de ses sources d’information, notes et archives personnelle ou professionnelles. »
34. La CIDH rappelle également le Principe 13 de la Déclaration, qui stipule que
L’exercice du pouvoir et de l’utilisation de fonds publics par l’État pour l’octroi de fréquences radio et télévision dans le but, entre autres, de faire pression sur les communicateurs sociaux et les moyens de communication et de les punir ou de les privilégier et de les récompenser en fonction des opinions qu’ils expriment portent atteinte à la liberté d’expression et doivent être expressément interdits par la loi. Les moyens de communication ont le droit de réaliser leurs travaux de façon indépendante. Toute pression directe ou indirecte exercée à l’égard de journalistes ou d’autres communicateurs sociaux dans le but d’empêcher la diffusion d’information est incompatible avec la liberté d’expression.
35. De plus, la CIDH a reçu de l’information révélant qu’en juillet 2009, la résidence de Sainlus Augustin de Hinche, journaliste pour La Voix des Amériques et Radio Kiskeya, a été la cible d’une attaque armée. L’information indique qu’Augustin accuse le député et candidat au Sénat Wilot Joseph, qui aurait été dérangé par certains articles d’Augustin.[39]
36. La CIDH appelle l’État haïtien a gardé en vue le Principe 9 de la Déclaration de Principes sur la Liberté d’Expression, qui indique que : « L’assassinat, le séquestre, l’intimidation, les menaces proférées contre les communicateurs sociaux ainsi que la destruction matérielle des moyens de communication, constituent des violations des droits fondamentaux de la personne et limitent gravement l’exercice du droit à la liberté d’expression. Les États ne doivent pas seulement prévenir et, le cas échéant, mener des enquêtes sur de tels faits, mais aussi punir leurs auteurs et veiller à ce que les victimes reçoivent une réparation adéquate. »
37. Finalement, tel que mentionné antérieurement,[40] la CIDH reconnaît que la Mission de stabilisation des Nations Unies en Haïti est fortement engagée à assurer des conditions de paix et de sécurité dans le pays depuis sa création en 2004. La MINUSTAH a déployé des efforts pour améliorer la situation de sécurité publique en appuyant la PNH dans ses efforts de prévention du crime et en mettant l’accent sur le renforcement institutionnel et la réforme de la police et des autorités judiciaires.
B. Administration de la justice
38. La CIDH note qu’un corps de police institutionnellement fort, qualifié et professionnel, accompagné d’un système de justice efficace, sont des éléments essentiels pour l’établissement et le maintien de l’état de droit dans toute société. Par conséquent, les mesures de réforme du corps de police d’Haïti doivent être accompagnées d’un renforcement du système de justice. En 2009, la CIDH a été informée que le système de justice continue d’être caractérisé par de graves lacunes, notamment une insuffisance de juges, des décisions ultra vires, de la corruption et l’application excessive de la détention avant le procès.
39. La CIDH reconnaît les efforts déployés par les autorités haïtiennes, conjointement avec la MINUSTAH et les organisations internationales, qui ont permis la réouverture de l’École de la magistrature en mars 2009. La formation fournie par cette école donnera aux juges les éléments nécessaires pour leur permettre d’exécuter leurs tâches de façon plus efficace, et il faut espérer qu’elle constituera une importante contribution à l’indépendance et à la force institutionnelle des autorités judiciaires. La Commission interaméricaine considère qu’il s’agit là d’un pas important vers le respect de la réforme légale qui a mené à l’adoption d’une série de lois au cours de l’année 2007.[41]
40. La CIDH fût enchantée d’apprendre que plusieurs maisons de la justice ont pu fonctionner en 2009. Il s’agit là d’organisations qui visent à faciliter l’accès des citoyens à la justice en fournissant des informations, des conseils juridiques, ainsi qu’une aide aux victimes.[42] La Commission interaméricaine espère que ces initiatives recevront l’appui requis non seulement pour qu’elles puissent continuer leurs activités, mais aussi pour que les efforts nécessaires soient déployés pour créer des maisons de la justice dans chaque région du pays.
41. La Commission interaméricaine reconnaît également les mesures prises par le Ministère de la Justice pour lutter contre la corruption dans le système de justice. À ce sujet, la CIDH a appris que de mars à mai, un certain nombre de magistrats avaient été congédiés ou suspendus pour corruption présumée et/ou négligence grave.[43] Cependant, les magistrats suspendus sont en attente d’une décision du Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire (CSPJ), dont les membres n’ont pas encore été nommés, en dépit du fait qu’il a été établi en vertu d’une loi adoptée en 2007. Le Sénat a fourni au Président une liste de candidats présélectionnés pour ce poste, mais le Président d’Haïti doit encore prendre des mesures à cet égard. En vertu du droit haïtien, le président du CSPJ fera aussi fonction de président de la Cour de Cassation, un poste vacant depuis presque cinq ans. La Commission interaméricaine estime que la prompte nomination du président du CSPJ serait un signe de volonté de la part des autorités d’aller de l’avant avec la réforme légale.
42. La CIDH a appris que le salaire mensuel d’un juge passera de 18 000 gourdes (450 $US) à 54 000 gourdes (1 350 $US) d’ici la fin de 2009.[44] Cependant, la CIDH est préoccupée par le fait que dans certains cas, les juges doivent personnellement assumer certains coûts du procès, notamment de l’eau offerte au jury ou l’essence requise pour le transport des jurés. Encore plus inquiétant est l’information qui indique que certains juges demandent des pots-de-vin pour faire avancer une affaire et que, dans certains tribunaux, des greffiers refusent même de fournir les documents s’ils ne reçoivent pas de l’argent de la part des parties. L’indépendance institutionnelle des tribunaux est liée à la structure et à l’organisation du pouvoir judiciaire et à sa séparation des autres branches de gouvernement. À cet égard, l’article 8 de la Convention américaine insiste sur le droit d’être jugé par un “tribunal compétent, indépendant et impartial”, ce qui, de l’avis de la CIDH, exige que les tribunaux soient autonomes des autres branches de gouvernement, libres de toute influence, menace ou interférence de toute autre source et pour quelque raison que ce soit, et possèdent d’autres caractéristiques nécessaires pour garantir l’exécution correcte et indépendante des fonctions judiciaires, telles un mandat et une formation professionnelle appropriée.[45] La CIDH note que le manque d’indépendance du pouvoir judiciaire peut mener à la corruption, qui, à son tour, mène souvent à l’impunité. Par conséquent, il est important que des procédures soient mises en place pour prévenir les situations possibles de corruption et y répondre, le cas échéant.
43. À ce sujet, la CIDH se réjouit de la décision prise par le Tribunal pénal fédéral de Berne, Suisse, de distribuer les fonds détenus par la famille de l’ancien dictateur haïtien Jean Claude Duvalier au peuple d’Haïti. Dans ses considérants, le Tribunal suisse a déterminé que la soi-disant fondation que possédait la famille de l’ancien dictateur pouvait être assimilée à une organisation criminelle, qui utilisait le pouvoir absolu du chef de l’État pour imposer un climat de terreur en Haïti et pour générer pour ses membres un revenu considérable par l’appropriation illicite de fonds publics.[46] Cette décision envoie un message très clair aux autorités de l’État dans le sens que la pratique d’appropriation illicite de fonds publics est un crime et que les chances d’impunité se font de plus en plus rares.
44. L’information reçue indique que le système de justice haïtien présente de graves lacunes en termes de transports et de communications, et qu’il a besoin de méthodes d’enquête plus modernes et scientifiques, notamment des analyses biologiques ou balistiques. Le manque de tels outils est problématique en termes de collecte et d’analyse des moyens de preuve, peut saper la confiance dans le résultat des processus judiciaires et peut contribuer au retard qu’accumule l’administration de la justice.
45. La capacité limitée du système de justice, l’absence de recours dans certains cas et le manque d’une aide juridique efficace sont tous des facteurs qui entraînent un accroissement de la population carcérale. Les personnes privées de liberté continuent de vivre dans des conditions congestionnées qui ne respectent pas les normes minimales universellement reconnues en matière de détention, et ce en violation de leurs droits fondamentaux. La CIDH a continué de recevoir de l’information confirmant que près de 80 % des personnes détenues en Haïti attendent encore que leur procès commence, et que le temps moyen passé en détention avant jugement est de 22 mois.[47] La CIDH a appris que l’aide juridique n’est pas fournie à une majorité de détenus au cours de cette période, ce qui crée une grave incertitude juridique. Tel qu’identifié par la Cour interaméricaine:
le droit d’accès à la justice reconnaît que dès le début, toute personne citée à procès doit avoir la possibilité effective d’obtenir une décision finale, sans retards indus qui pourraient résulter du manque de diligence que les tribunaux doivent garantir, tel qu’observé en l’espèce.[48] Autrement, à la lumière du droit à un recours effectif consacré dans l’article 25 de la Convention, il est évident que la personne poursuivie ne peut pas recourir aux garanties contenues dans l’article 8 de la Convention, ce qui serait inutile s’il était impossible de commencer les procédures en premier lieu.[49] [50]
46. Tel qu’identifié précédemment par la CIDH, ces lacunes minent la capacité du système de justice en Haïti d’assurer et de protéger effectivement les droits et libertés fondamentaux auxquels ont droit les habitants de ce pays, ce qui entraîne une tendance à l’impunité pour des violations commises par des acteurs tant étatiques que non étatiques.[51] À cet égard, la Commission interaméricaine ne saurait trop insister sur sa grave préoccupation quant à l’impunité totale qui entoure la commission de crimes violents commis par des agents de police dans certaines régions du pays et tient à rappeler aux autorités le besoin pressant de trouver un remède à l’absence systématique de poursuites et de punition des agents de l’État qui commettent des violations des droits humains, peu importe le quel secteur de la société duquel les victimes proviennent.
C. Situation de personnes et de groupes particuliers
1. Personnes privées de liberté
47. Pendant un certain nombre d’années, la CIDH, des organisations locales et internationales, ainsi que d’autres acteurs civils et politiques ont condamné les conditions dans lesquelles les gens sont détenus en Haïti. Suite à cette préoccupation, des rapports ont été publiés sur la question, des commissions ont été mises sur pied et de nombreuses recommandations ont été formulées.[52] En dépit de tous les efforts déployés pour dénoncer et améliorer la situation, selon l’information reçue en 2009, ainsi que sur la base de la situation observée par la CIDH au cours de l’année, la situation des détenus en Haïti ne s’est pas améliorée. En fait, on dit souvent que le système pénitentiaire ressemble plus à une école du crime qu’à une institution correctionnelle chargée de réhabiliter les personnes.
48. En 2009, la CIDH a continué de recevoir des informations inquiétantes qui révélaient que 80% des personnes sous la garde de l’État attendaient encore de passer en cour. La Commission interaméricaine note qu’au cours de cette période, qui peut durer plusieurs années, les personnes attendant de passer en jugement sont détenues dans les mêmes locaux que des criminels condamnés et sont traitées comme tels, en violation de leur droit à la présomption d’innocence. En plus des conditions qui règnent dans les prisons, la CIDH est particulièrement inquiète de la situation des personnes détenues dans les commissariats locaux, parfois pour une période qui s’étend sur plusieurs mois. Parce que ces endroits ne sont pas des prisons officielles, aucun budget n’est affecté pour la nourriture et les soins des détenus, et les agents ne reçoivent pas de formation particulière de la part de l’Administration pénitentiaire sur la manière de traiter les détenus de façon générale, ou les personnes qui ont des besoins spéciaux.
49. La Commission interaméricaine accueille favorablement l’adoption de la Loi règlementant la garde à vue, les attributions et le fonctionnement du juge de la légalité de l’arrestation, de la détention et la procédure de l’habeas corpus.[53] Entre autres choses, la loi stipule que les personnes ne peuvent pas être mises en détention à moins d’avoir été prises en flagrant délit, ou dans des circonstances spécifiques qui y sont définies; que la détention excédant 48 heures qui n’est pas expressément autorisé par un juge sera assimilée à une détention arbitraire; que la violation des droits d’une personne en cours d’arrestation, de détention ou d’interrogatoire rend nulle la procédure, ainsi que tout témoignage déposé dans de telles circonstances; et qu’une personne arrêtée pour un délit doit être jugée dans un délai d’une année. Cette période peut être prolongée à deux ans dans les cas de crimes graves, autrement la personne devra être relâchée conditionnellement moyennant comparution à toutes les phases subséquentes de la procédure. Finalement, la loi fixe une période d’une année après son adoption pour donner aux différentes autorités impliquées pour le respect des dispositions et la mise en œuvre des mesures qu’elles contiennent. À ce sujet, la CIDH rappelle la décision de la Cour interaméricaine dans l’affaire Yvon Neptune:
la Convention stipule qu’une détention doit faire l’objet d’une prompte revue judiciaire. La Cour a compris qu’un contrôle judiciaire immédiat est une mesure destinée à éviter la détention arbitraire ou illégale, sans perdre de vue le fait que sous l’empire de la règle de droit, le juge doit garantir les droits de la personne détenue, autoriser l’adoption de mesures préventives ou coercitives quand cela s’avère strictement nécessaire et, en général, assurer que l’accusé est traité d’une façon conséquente avec la présomption d’innocence. [54]”
50. La CIDH se félicite de l’initiative susmentionnée et espère que les exigences procédurales seront facilitées afin que cette loi régissant la détention puisse entrer en vigueur aussitôt que possible. Les efforts investis par l’État pour la mise en œuvre de cette loi seront suivis de près par la Commission interaméricaine, comme un pas de plus vers le respect par Haïti de ses obligations internationales en ce qui concerne les droits des personnes privées de liberté.
51. En plus d’une détention extensive avant le procès, une autre question qui préoccupe la CIDH est le fait que les personnes qui attendent leur procès sont détenues avec des personnes condamnées. La Convention américaine, ainsi que d’autres instruments internationaux, souligne l’importance de séparer les accusés des condamnés.[55] À ce sujet, la Cour interaméricaine note que:
L’article 5(4) de la Convention américaine impose aux États l’obligation d’établir un système de classification pour les prisonniers dans les centres pénitentiaires afin de garantir que les prévenus sont séparés des condamnés, et soumis à un régime approprié à leur condition de personnes non condamnées.[56] Ces garanties peuvent être comprises comme un corollaire du droit du prévenu d’être présumé innocent aussi longtemps qu’il n’a pas été trouvé coupable aux termes de la loi, comme le stipule l’article 8(2) de la Convention. L’tat doit prouver l’existence et le fonctionnement d’un système de classification qui respecte les garanties établies à l’article 5(4) de la Convention, ainsi que l’existence de circonstances exceptionnelles s’il ne sépare pas les personnes accusées des personnes condamnées.[57]
52. La Commission interaméricaine a reçu des informations indiquant que la prison de St-Marc, de construction récente, dans le département d’Artibonite, représente une avancée très importante dans le domaine de la détention. Selon ces informations, la prison de St. Marc contient une section pour les mineurs, une section pour les femmes et une section pour les jeunes filles; les personnes condamnées sont séparées de celles qui sont en détention provisoire; et tous les détenus ont accès à des programmes d’alphabétisation. Cependant, la CIDH note que la prison de St. Marc est le seul établissement de détention qui sépare les personnes condamnées de celles qui se trouvent en détention avant leur procès et elle demande instamment aux autorités d’adopter cette pratique, non comme une exception mais comme une règle. À ce sujet, la Commission interaméricaine se réjouit de la construction en 2009, avec l’appui du Groupe de travail sur la stabilisation et la reconstruction de Commerce international Canada et de divers organes des Nations Unies, d’un nouveau centre de détention à Croix-des-Bouquets, qui accueillera jusqu’à 750 prisonniers, ainsi qu’un nouvel immeuble pour l’Inspectorat général de la PNH. La CIDH portera une attention particulière aux nouveaux développements en la matière.
53. Les informations disponibles à la Commission interaméricaine indiquent que l’Administration pénitentiaire, sous l’égide de la PNH, ne reçoit pas la priorité adéquate. Ces informations révèlent également que le salaire du personnel carcéral est souvent insuffisant; que leurs coins de repos sont dans les mêmes conditions que les cellules des détenus; et que la nourriture remise au personnel est souvent préparée par les détenus, représentant une source de préoccupation.[58]
54. Une constante préoccupation pour la CIDH en 2009 fût les conditions dégradantes et inhumaines de la majorité des détenus en Haïti.[59] En moyenne, il y a 0,62 m2 pour chaque détenu en Haïti, alors que l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus fixe cet espace à un minimum de 4,5 m2.[60] Cette situation a été décrite dans plusieurs rapports précédents,[61] et sur la base des observations faites directement par la CIDH au cours de sa visite en Haïti ainsi que de l’information reçue, elle ne s’est pas améliorée. Par exemple, lorsque la CIDH a visité la Prison de Pétion-Ville pour femmes, 312 détenues – dont 7 étaient enceintes – étaient réparties dans 19 cellules. De plus, les détenues ont signalé à la CIDH que leur situation de santé ne recevait pas suffisamment d’attention de la part des autorités. Lorsque la Commission interaméricaine a visité le Pénitencier National, elle a constaté que l’infirmerie comptait 6 matelas, y compris une vieille chaise de dentiste, pour un total de 4 000 détenus, dont plus de 50 sont gravement malades. La CIDH a remarqué qu’il n’y a pas assez de place pour permettre à tous les détenus de dormir en même temps.
55. La Cour interaméricaine a déjà décrit la situation du Pénitencier national de Port-au-Prince dans les termes suivants:
L’État ne conteste pas les (…) allégations selon lesquelles: le surpeuplement excessif, les conditions insalubres et les repas médiocres des prisonniers au Pénitencier national sont loin de correspondre aux normes consacrées dans l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus des Nations Unies; et en dépit de flambées de violence répétées au Pénitencier national, l’État a maintenu sa structure inadéquate intacte.[62]
56. La Commission interaméricaine a été particulièrement troublée d’être mise au courant de la situation de Ronald Dauphin, qui a été arrêté en mars 2004 et se trouvait encore en détention préventive au Pénitencier national au cours de l’année 2009. M. Dauphin souffre de problèmes de santé importants, notamment de forts maux de tête et de pertes de conscience fréquentes, raison pour laquelle deux médecins ont recommandé son transfert dans un complexe hospitalier.[63] Les autorités responsables ont apparemment refusé son transfert, et ce sans justification.
57. Les conditions de détention dans les cellules de détention des commissariats de police ne sont guère meilleures. Au commissariat de Gonaïves, qui peut normalement recevoir jusqu’à soixante-quinze détenus, il y en a plus de trois cents. Ils n’ont que peu ou pas de lumière ou de ventilation, des conditions sanitaires inadéquates et aucun accès au traitement médical. Le manque d’espace exige d’eux qu’ils dorment tour à tour. Les informations reçues par la CIDH indiquent que la situation est tout aussi inadéquate dans d’autres régions du pays.[64]
58. La CIDH se réjouit de la mise en œuvre du Plan stratégique de développement 2007-2012 préparé par la direction de l’Administration pénitentiaire, qui inclut des considérations relatives à l’infrastructure, au personnel, à l’équipement et au matériel, ainsi qu’au bien-être physique et psychologique des détenus. La Commission interaméricaine encourage l’État à investir les ressources nécessaires pour la mise en œuvre et le succès de ce plan stratégique et rappelle que “toute personne privée de liberté a le droit de vivre dans des conditions de détention qui sont compatibles avec sa dignité personnelle, qui doit être assurée par l’État, parce que l’État occupe la position spéciale de garant relativement à de telles personnes, puisque les autorités pénitentiaires exercent un contrôle total sur les détenus.”[65]
2. Défenseurs des droits humains
59. Au cours de sa 134e session de mars 2009, la CIDH a statué sur le bien-fondé du cas de Lysias Fleury, où il a été établi que la victime avait été détenue illégalement le 24 juin 2002 à Port-au-Prince, et qu’elle avait subséquemment été soumise à un traitement cruel, inhumain et dégradant par des agents de l’État, notamment en raison de son rôle en tant que défenseur des droits humains, du manque de diligence requise dans l’enquête et de l’impunité des personnes responsables. La CIDH a conclu qu’Haïti s’était engagée dans la détention arbitraire, la torture et le traitement inhumain de M. Fleury. De même, la the Commission interaméricaine a trouvé que l’État n’avait pas assuré le droit de M. Fleury à un procès équitable et à la protection judiciaire. Par conséquent, la CIDH a conclu que l’État haïtien était responsable de violations des droits humains aux termes des articles 5, 7, 8 et 25 de la Convention américaine. Après avoir transmis le rapport à l’État et notifié les requérants, le 5 août 2009, la CIDH a déposé une requête dans le cas de M. Fleury devant la Cour interaméricaine des droits de l’Homme.
60. Dans la section sur Haïti du chapitre IV de son Rapport annuel 2008, la Commission interaméricaine a signalé que moins de plaintes avaient été reçues cette année par rapport à la violence et aux menaces faites en guise de représailles contre les défenseurs des droits de la personne. Cependant, au cours de l’année 2009, la CIDH a constaté une recrudescence de telles occurrences et elle est particulièrement préoccupée par la constance de tels actes de persécution, menaces et de mauvais traitements qui affectent les défenseurs des droits de la personne dans certaines régions du pays, qui vont de coups de fil anonymes à des volées de coups importantes.
61. La Commission interaméricaine rappelle que les défenseurs des droits de la personne, qui viennent de différents secteurs de la société civile, contribuent de façon fondamentale à l’existence et au renforcement des sociétés démocratiques. Par conséquent, le respect des droits de la personne dans un état démocratique dépend dans une mesure importante des défenseurs des droits de la personne qui jouissent de garanties effectives et adéquates pour être ainsi en mesure d’exécuter leurs activités librement.[66] Dans ce sens, la CIDH rappelle à l’État qu’il est de son devoir d’assurer les conditions nécessaires pour faciliter le travail de ces défenseurs.
62. Au cours de l’année 2009, la Commission interaméricaine a octroyé des mesures conservatoires pour deux organisations de défenseurs des droits de la personne.[67] À cet égard, la Commission interaméricaine exprime ses préoccupations relativement au fait que les demandes d’information sur les mesures conservatoires en faveur des défenseurs d’Haïti sont restées sans réponse ou qu’aucune action n’a été prise pour faire respecter ces mesures. Il y a lieu d’insister sur le fait que les bénéficiaires de mesures conservatoires qui continuent d’exercer leurs activités le font en prenant des risques extrêmes en raison de l’absence de mesures de sécurité de la part de l’État qui doit assurer leur droit à la vie et à l’intégrité physique. Par conséquent, la CIDH demande instamment à l’État haïtien de prendre les mesures nécessaires pour prévenir et éradiquer toute forme de persécution contre les personnes qui consacrent leurs efforts à la défense et à la promotion des droits de la personne.
3. Femmes
63. En 2009, la Commission interaméricaine a continué de recevoir des informations indiquant que les femmes sont la cible de discrimination, en dépit d’un certain nombre d’initiatives récentes et spécialisées de l’État, en particulier celles qu’a lancées le Ministère à la Condition Féminine et aux Droits des Femmes pour fournir une plus grande protection et des services accrus aux femmes victimes de violence.[68] Quelques mesures adoptées pour remédier à cette situation montrent une compréhension de la gravité des problèmes existants et l’engagement de l’État et de secteurs non gouvernementaux de tenir compte des besoins spécifiques des femmes dans les politiques publiques visant à prévenir, à sanctionner et à éradiquer les actes de discrimination et de violence contre les femmes. La CIDH réitère son engagement de collaborer avec l’État haïtien pour la recherche de solutions aux problèmes identifiés.
64. En 2009, pour souligner la situation alarmante de violence et de discrimination contre les femmes, au titre d’une question fondamentale de droits de la personne, la CIDH a publié le Rapport sur le droit des femmes de vivre libres de violence et de discrimination en Haïti.[69] Le Rapport indique que les actes de violence contre les femmes sont une manifestation particulièrement extrême et grave du traitement discriminatoire que les femmes reçoivent encore dans la société haïtienne. La discrimination et les actes de violence qui en résultent continuent d’être tolérés dans la société haïtienne, ce qui à son tour perpétue un climat d’impunité à l’encontre de ces actes et de leur répétition. Les recommandations du rapport sont axées sur la conception d’une police d’État nationale qui tient compte des formes de violence qui se manifestent à l’égard des femmes, en temps de paix comme en temps d’agitation politique, afin de réaliser des progrès dans le diagnostic, la prévention et la réponse à ces problèmes ainsi que d’incorporer les besoins spécifiques des femmes dans les programmes publics. La Commission interaméricaine insiste sur l’importance d’adopter une approche pluridisciplinaire et intersectorielle de ces problèmes, qui cherche à intégrer des normes d’égalité des sexes dans tous les secteurs du gouvernement. Les recommandations lancent d’autre part un appel à l’État haïtien pour qu’il adopte des mesures urgentes pour éradiquer les tendances socioculturelles discriminatoires qui sont basées sur le concept que les femmes sont inférieures, et que, dans l’élaboration des politiques publiques, il tienne compte du problème de la discrimination et des inégalités structurelles dont les femmes font l’expérience avec comme objectif général celui de traiter les actes de violence qui sont perpétrés contre les femmes et les filles en Haïti.[70]
65. Depuis le temps que la CIDH évalue la situation des droits de la personne en Haïti, les lacunes fondamentales du système de justice haïtien ont été identifiées au nombre des questions qui causent les plus grandes préoccupations. Dans cette perspective, la Commission interaméricaine note avec une préoccupation particulière que la plupart des cas de violence contre les femmes ne font jamais formellement l’objet d’enquêtes, ni de poursuites ou de sanctions de la part du système de justice. Cette tendance d’impunité systématique envoie le message que ces formes de violence et de discrimination sont et continueront d’être tolérées. La prévalence de la discrimination contre les femmes dans la société haïtienne constitue une barrière supplémentaire pour les femmes victimes de violence qui veulent accéder à la justice.
66. Un cas particulièrement grave reflétant cette situation a motivé une requête de mesures provisoires à la Cour interaméricaine des droits de l’Homme. La Commission interaméricaine a été informée qu’une jeune fille de 17 ans, identifiée comme A.J. avait été violée par un agent de police en le 4 octobre 2009 après avoir refusé d’avoir des rapports sexuels avec lui, en échange pour la libération du père de la jeune fille, identifié comme B.J. À la suite du viol, la famille d’A.J. et des membres de l’ONG qui la représentait ont apparemment fait l’objet d’actes d’intimidation de la part du violeur, un chef de police local. Le 28 mars 2009, B.J. a été trouvé mort de blessures et lésions par balles, après avoir été kidnappé par cinq hommes armés quelques jours auparavant. Après que la CIDH ait eu accordé des mesures conservatoires pour la protection d’A.J., sa famille et les membres de l’ONG en question, la maison d’A.J. a été incendiée et d’autres actes de harcèlement et des menaces ont continué contre les bénéficiaires des mesures. La CIDH a demandé des mesures provisoires à la Cour interaméricaine, lesquelles furent accordées le 24 août 2009. Selon l’information disponible, l’État n’a signalé aucune mesure spécifique mise en œuvre pour la protection des bénéficiaires.
67. La CIDH est particulièrement troublée par le fait que les femmes victimes de violence ne sont pas enclines à s’adresser au système de justice. Les victimes et leurs familles n’ont aucune confiance en la capacité du système de justice à réparer les dommages commis, et elles sont souvent maltraitées lorsqu’elles essaient de se servir du recours en justice. Cette combinaison de facteurs laisse les victimes avec un sentiment d’insécurité, de manque de défense et de méfiance envers l’administration de la justice. La Commission interaméricaine ne saurait assez insister sur l’importance de renforcer la capacité des institutions pour lutter contre la tendance à l’impunité dans les cas de violence envers les femmes, par la conduite d’enquêtes pénales efficaces qui permettent de mener les affaires en procès, pour ainsi assurer que les crimes soient sanctionnés de façon appropriée et que les victimes reçoivent des réparations adéquates.
4. Enfants
68. En 2009, quelque 50 000 enfants vivaient en Haïti dans des abris et des orphelinats. Seul l’un d’entre eux, l’abri Le Carrefour, est financé en partie par l’État. Le Carrefour accueille des enfants de la rue, des orphelins, des enfants en besoin de protection, ainsi que des enfants en conflit avec la loi, non condamnés mais plutôt placés là par l’IBERS (Institut du Bien-être Social et de Recherches). Cet abri accueille présentement 387 enfants, et approximativement le même nombre est hébergé dans ses deux annexes, l’une étant à Petite Place Cazeau et l’autre dans le Plateau Central. Le Centre de la Petite Place Cazeau est utilisé comme centre de réinsertion pour les jeunes adultes et il leur fournit de l’aide pour trouver du travail avant leur départ. La majeure partie de l’ameublement de l’abri Le Carrefour est d’ailleurs construite par les adolescents de la Petite Place Cazeau. La CIDH reconnaît la valeur de cette initiative, mais il convient de noter que durant sa visite de mai, elle a été informée que le personnel du Carrefour n’avait pas reçu son salaire de l’État depuis plus de huit mois, et ce pour la deuxième année consécutive. La Commission interaméricaine espère vivement que cette situation va être traitée dans le budget adopté à l’automne 2009 afin que le projet puisse continuer effectivement.
69. La CIDH a pris note des efforts faits au sein de la Brigade de Protection des Mineurs (BPM), une unité spécialisée de la PNH, pour traiter de façon appropriée le problème des enfants en conflit avec la loi et des enfants en besoin de protection. Cette unité a été créée en 2002, avec l’appui de l’UNICEF, et elle compte environ 35 agents de police en poste tout autour de la capitale. Au cours de sa réunion avec le chef de la BPM, la Commission interaméricaine a été informée que des programmes allaient être mis sur pied dans d’autres régions pour former les agents de police. La CIDH appuie fortement cette initiative et insiste sur le besoin de placer des membres de cette Brigade dans toutes les régions du pays pour qu’elle soit ainsi accessible à chaque enfant, indépendamment de sa situation géographique.
70. Cette unité est particulièrement importante si l’on considère l’information alarmante reçue qui indique que les enfants sont de plus en plus visés par les chefs de groupes criminels aux fins d’enlèvement, non seulement comme victimes mais aussi comme participants, pour exécuter les actes les plus visibles, notamment nourrir la victime ou recueillir le montant de la rançon. Ceci a entraîné l’arrestation d’un plus grand nombre d’enfants accusés de kidnapping ou d’association de malfaiteurs.[71] En 2009, quelque 350 enfants en conflit avec la loi étaient détenus dans des établissements de détention en Haïti, la vaste majorité d’entre eux se trouvant en détention avant-procès. Au cours de sa visite aux Gonaïves, la Commission interaméricaine a été particulièrement inquiétée de la situation des mineurs détenus avec des adultes au Commissariat de Toussaint Louverture. La Commission a eu l’occasion de rencontrer le Commissionnaire du Gouvernement pour lui exprimer sa préoccupation à ce sujet. Subséquemment, la CIDH a été informée qu’avec un appui important de la MINUSTAH, une cellule conçue spécialement pour les garçons avait été construite au Commissariat de Toussaint Louverture à Gonaïves, ce qui allait permettre de les détenir séparément des adultes.[72] La CIDH est très favorable à la construction de cette cellule.
71. Au Centre de détention pour mineurs Delmas 33, le seul qui soit exclusivement consacré aux enfants en conflit avec la loi, le surpeuplement est manifeste. Au cours de la visite de mai 2009 de la CIDH, le Centre, qui était conçu pour 72 enfants, en accueillait 174, dont 13 avaient été condamnés, dans la fourchette d’âge de 10 à 18 ans.[73]
72. La CIDH est heureuse d’apprendre que la BPM envisage de plus en plus de considérer des mesures alternatives à l’emprisonnement, telles un retour des objets volés ou la conclusion d’une entente avec la victime de l’acte illégal en question. Bien qu’il soit clair que ces mesures ne peuvent être prises à la suite d’un crime grave, mais seulement de délits mineurs, la Commission interaméricaine considère que ces mesures alternatives sont une façon positive de contribuer à la décongestion des cellules surpeuplées et de résoudre le problème des enfants qui sont détenus avec les adultes. La CIDH reconnaît également le projet du Barreau de Port-au-Prince qui, conjointement avec l’UNICEF, finance un avocat qui se dédie entièrement à la prestation de services d’aide juridique gratuite aux mineurs. Cependant, d’autres régions du pays ne sont apparemment pas couvertes par une telle aide.
73. En plus de la situation du Centre Delmas 33 et de Gonaïves, la CIDH a reçu des informations inquiétantes sur la situation des mineurs détenus à Jérémie, lesquelles révèlent que la détention avant le procès dure généralement jusqu’à 5 mois, les conditions de détention incluent le surpeuplement et la pluie crée des conditions dangereuses, quelques jeunes partagent leur lieu de détention avec des adultes, la nourriture, l’eau ainsi que l’accès aux vêtements et aux soins médicaux sont inadéquats, aucune ressource éducative n’est disponible, la représentation juridique est inégale ou non existante et certains juges persistent à ne pas se présenter aux audiences prévues ou alors le dossier de la cause n’est pas disponible durant l’audience.[74]
74. En ce qui concerne la ville de Cap Haïtien, la Commission interaméricaine était satisfaite de savoir qu’un Tribunal pour Enfants avait été ouvert et que les juges qui seront affectés à ce tribunal recevront une formation spéciale dans le cadre du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), de la MINUSTAH et de l’UNICEF.[75] La CIDH estime que l’établissement de ce tribunal représente une avancée dans le processus de réforme du système de justice haïtien et espère vivement qu’il permettra de réaliser des avancées dans ce domaine crucial. Cependant, lors d’une réunion avec les juges du Tribunal pour Enfants de Port-au-Prince, les juges ont signalé à la CIDH que les ressources institutionnelles ne sont pas en place pour leur permettre d’appliquer la loi en vigueur. À titre d’exemple, selon cette loi, si le juge condamne un enfant, il ne peut que le renvoyer chez ses parents, l’envoyer dans un centre éducatif sous surveillance, ou le placer dans une institution psychiatrique.[76] Cependant, puisque de tels centres n’existent pas en Haïti, le juge qui condamne un enfant à une peine dans un tel centre sait que l’enfant finira par être envoyé au Centre Delmas 33 ou, pire encore, rester dans son centre actuel.[77] Les juges mentionnent également qu’il y a un nombre élevé d’enfants en prison dont le cas n’est pas porté à l’attention du pouvoir judiciaire et qui ne sont jamais présentés devant le Tribunal pour Enfants.[78] La Commission interaméricaine note que cette situation entraîne une double illégalité au détriment des mineurs, parce qu’ils sont détenus dans des prisons pour adultes, d’un côté, et qu’ils ne sont pas transférés dans la juridiction du Tribunal pour Enfants, de l’autre.
75. La CIDH continue d’être préoccupée par la situation de milliers d’enfants travailleurs haïtiens non payés, condamnés à vivre comme restavek (“vivre avec, rester avec” en créole). Le système de restavek prive les enfants de leurs milieux familiaux et les assujettit à de multiples formes d’abus, y compris l’exploitation économique, la violence sexuelle et les châtiments corporels, tout en violant ainsi leur droit à la sécurité, à l’éducation, à la santé et à la nourriture. Il a été rapporté qu’un bon nombre de ces enfants étaient victimes de traite des enfants tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les formes contemporaines d’esclavage a décrit le système des restavek comme une “forme moderne d’esclavage”.[79]
76. La Commission interaméricaine est également préoccupée par le nombre croissant d’enfants des rues qui s’organisent en bases afin de survivre dans le violent environnement de la rue. Les chefs de bande exploitent souvent les plus jeunes; la violence sexuelle est fréquente, parfois sous forme de rituel d’initiation; et les enfants sont prêts à tout faire pour s’assurer qu’ils appartiennent à une de ces bases, surtout que l’alternative d’être seul mènera vraisemblablement à leur mort.[80] Les seules organisations disponibles pour fournir un appui à ces enfants dans ces secteurs sont des ONG locales et internationales, mais il n’y a pas de programme à long terme en place.[81] La Commission interaméricaine demande avec instance aux autorités haïtiennes de prendre des mesures concrètes pour fournir une alternative à ces enfants. Comme l’a fait remarquer la CIDH à plusieurs reprises, les enfants sont parmi les membres les plus vulnérables de la société et ont droit à une protection spéciale de la part de l’État afin de sauvegarder leurs droits de façon efficace. Par conséquent, la Commission interaméricaine demande avec instance à l’État de prendre les mesures qui s’imposent pour donner plein effet aux droits des enfants aux termes de l’article 19 de la Convention américaine, pour garantir que des mesures de protection effectives sont en place, comme le requiert leur condition de mineurs et pour assurer leur pleine jouissance des droits et libertés consacrés dans la Convention relative aux droits de l’enfant, ratifié par l’État haïtien le 8 juillet 1995.
D. Droits économiques, sociaux et culturels
77. La pauvreté extrême reste l’un des défis les plus extensifs et complexes auxquels fait face Haïti, avec ses effets conséquents sur les droits humains. Même si le contexte socio-économique s’est généralement amélioré depuis 2008, des rapports démontrent que près d’un tiers de la population fait face à une insécurité alimentaire modérée ou extrême en termes d’accès à la nourriture,[82] et que la santé et l’éducation sont des domaines dans lesquels la capacité de l’État de fournir des services de base est la plus faible.[83] Des organisations signalent qu’au cours du premier semestre de 2009, Haïti a ressenti l’impact de la crise financière internationale.[84] Bien que les statistiques relatives à l’emploi soient difficiles à cerner en Haïti, certaines estimations fixent le taux de chômage à 70 %.[85] Il convient de noter qu’Haïti n’a aucun filet de sécurité sociale, ni d’assurance-chômage, ni de soins de santé couverts par l’État, et qu’à l’échelle nationale, seuls trois enfants sur cinq suivent l’école et vingt-cinq pour cent des districts ruraux d’Haïti n’ont aucune école.[86]
78. À Cité-Soleil, qui a une population d’environ 500 000 personnes, la CIDH a été avisée qu’il n’y a qu’un seul hôpital avec trente lits et que seulement 2,8 % de la population adulte a accès à l’eau potable. Alors que 14 % des familles participent à une activité qui génère un revenu, 60 % de la population mange une fois par jour, 18 % deux fois par jour, 3,8 % mangent trois fois par jour et 19,2 % ne mangent que “parfois”.[87]
79. De plus, la CIDH a appris que la région de Gonaïves souffre encore des conséquences dévastatrices liées aux ouragans consécutifs de l’année dernière. La CIDH a appris que plus de neuf mois après les ouragans, quelque 450 familles (représentant 1 460 personnes) vivent encore dans des abris, dans des conditions inadéquates avec aucun matelas, une hygiène déplorable et une quantité insuffisante de nourriture. Il y a encore des inondations chaque fois qu’il pleut et bien que le pays n’ait pas encore été affecté par des ouragans cette année, c’est tout de même une source de préoccupation constante pour la population et pour les autorités. À cet égard, la Commission interaméricaine a appris qu’une bonne partie de la population a quitté la ville de Gonaïves pour migrer en direction des montagnes où elle espère retrouver une plus grande stabilité environnementale.[88]
80. Haïti était censé ratifier en 2009 le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, mais cette décision a été repoussée pour des raisons non spécifiées. La Commission interaméricaine encourage fortement l’État de ratifier le PIDESC puisqu’il représenterait un engagement de prioriser et d’améliorer la situation socioéconomique du pays.[89] À cet égard, la CIDH rappelle que le besoin de sécurité et de justice doit être accompagné du développement social et économique afin d’obtenir une stabilité durable. L’État ne sera pas en mesure de garantir à la population haïtienne l’exercice de ses droits sociaux, économiques et culturels en l’absence d’institutions et de services publics fonctionnels.
81. Un fait étroitement lié à l’environnement social et économique prédominant en Haïti est le nombre massif d’Haïtiens qui décide de quitter le pays, en dépit des conditions extrêmement difficiles qui les attendent. Tout comme au cours des années précédentes, en 2009 la CIDH a été préoccupée d’apprendre que des dizaines d’Haïtiens, connus sous le nom de “boat people”, avaient trouvé la mort en tentant de quitter le pays. Ces personnes paient pour embarquer sur des bateaux de construction extrêmement précaire pour essayer de trouver de meilleures conditions de vie ailleurs, habituellement aux États-Unis.
82. Une autre préoccupation de la Commission interaméricaine est la situation des Haïtiens expulsés vers Haïti. La CIDH note d’abord que dans la plupart des cas, les ”rapatriés” ont quitté Haïti quand ils étaient encore très jeunes, se sont adaptés au pays d’accueil et souvent ne parlent plus ni le créole ni le français. Selon l’information reçue par la CIDH, la seule République dominicaine rapatrie quelque 20 000 Haïtiens chaque année.[90] Indépendamment de l’endroit d’où les Haïtiens sont expulsés, il n’existe aucun programme de réinsertion au sein de l’État haïtien. Chaque personne rapatriée est accueillie par le Bureau national d’immigration, qui lui remet entre 500 et 1000 gourdes (12 $ à 24 $ US) puis la laisse se débrouiller par elle-même.[91] En l’absence de programmes pour les aider à se réhabituer à Haïti, ces personnes ne sont, dans la plupart des cas, pas seulement pauvres et sans emploi mais également stigmatisées par le reste de la population, qui souvent les associe à la criminalité et leur reproche l’insécurité dans le pays. Les rapatriés essaient habituellement de quitter Haïti à nouveau dès qu’ils en ont l’occasion, même si ce n’est pour aller qu’en République dominicaine, où ils continuent d’être la cible d’actes de violence. Ces actes peuvent être aussi extrêmes que la nouvelle de la décapitation du Haïtien Carlos Nérilus en date du 2 mai 2009 à Buenos Aires en République dominicaine, devant une foule qui clamait son approbation, et la nouvelle de la décapitation du Haïtien Tony Charlis en date du 22 octobre, dans des circonstances similaires.[92]
83. La CIDH invite les autorités haïtiennes à être plus proactives en ce qui concerne la situation, à faire valoir des accusations criminelles contre les personnes responsables du transport des boat-people quand cela met en danger la vie des gens, à négocier des accords de travail pour les migrants avec les pays insulaires voisins[93] et à mettre en œuvre des programmes de réinsertion pour les Haïtiens rapatriés.
V. OBSERVATIONS FINALES
84. Tout d’abord, la CIDH note que l’année 2009 a été caractérisée par une stabilité relative en Haïti, une amélioration générale dans la situation de sécurité et un engagement important de la communauté internationale de réaliser de nombreux projets de développement social et économique. Ces réalisations demeurent fragiles et la Commission interaméricaine, tout en les reconnaissant, continuera de surveiller étroitement la situation des droits humains en Haïti.
85. En dépit des avances spécifiques identifiées, la CIDH doit également noter que bon nombre des problèmes qu’elle a observé en Haïti au cours de 2009 proviennent des mêmes situations non résolues du passé, qui avaient été identifiées dans ses rapports précédents au sujet de ce pays. En effet, la Commission interaméricaine a antérieurement exprimé sa préoccupation sur la sécurité publique, l’administration de la justice, l’impunité et la situation de personnes et groupes particuliers (femmes, enfants, défenseurs des droits humains et journalistes) en Haïti. Ces préoccupations sont encore très présentes, et Haïti continue de souffrir de déficiences structurelles et institutionnelles qui exigent des réformes et une assistance à long terme. L’échec du système dans l’administration efficace et prompte de la justice, la prévalence de la corruption et un manque important de ressources financières et humaines contribuent tous à la création d’un environnement d’impunité générale qui affecte la capacité de l’État de garantir et de respecter les droits fondamentaux de ses habitants.
86. La Commission interaméricaine doit encore une fois mettre l’accent sur l’importance d’élaborer une stratégie et une politique de réforme à long terme pour traiter les faiblesses structurelles et législatives dans ces domaines. À cet égard, la CIDH réitère l’importance du rôle de la communauté internationale pour fournir une aide financière et technique critique à la mission d’Haïti, afin de traiter les problèmes de longue date et d’obtenir un changement et une stabilité à long terme, ainsi que, en particulier, le besoin d’élaborer des programmes en collaboration et en coordination avec le gouvernement haïtien et d’autres acteurs clés.
87. Sur la base de l’information et de l’analyse de ce rapport et à la lumière de ses conclusions, la Commission interaméricaine recommande que la République d’Haïti prenne les mesures suivantes:
1. Mettre en œuvre la série de lois adoptées en 2007 sur l’indépendance du pouvoir judiciaire, notamment en ce qui a trait à la nomination du Président du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire.
2. Faire en sorte que les tribunaux soient en mesure d’assumer leur rôle, en particulier le devoir d’enquêter, de poursuivre et de punir les personnes responsables de violations de droits de la personne.
3. Se consacrer pleinement et promptement à la mise en œuvre du Plan stratégique de développement de l’administration pénitentiaire et de la Loi réglementant la garde à vue, récemment adoptée.
4. Poursuivre le processus de triage de la PNH, avec le plein appui de l’État.
5. Assurer la prévention et la punition des crimes violents et renforcer les mécanismes de responsabilisation afin de tenir efficacement les contrevenants responsables de leurs crimes.
88. En vue d’une résolution des problèmes identifiés dans le présent rapport, la CIDH réitère son engagement de collaborer avec l’État haïtien et offre son assistance au gouvernement et au peuple d’Haïti dans leurs efforts pour remédier aux situations problématiques identifiées.
[1] Communiqué de presse de la CIDH 43/09, 30 juin 2009. [2] Idem. [3] La CIDH insiste sur le fait que même si des mesures conservatoires ont été octroyées en juin 2008 pour tous les détenus du Commissariat des Gonaïves, elle a remarqué, au cours de sa visite, que la situation ne reflétait pas le moindre effort de la part de l’État de mettre en œuvre lesdites mesures ou d’améliorer la situation. Les installations, qui ont une capacité d’hébergement de soixante-quinze détenus, en comptaient en fait plus de trois cents; les conditions de détention incluaient un surpeuplement, peu ou pas de lumière ou de ventilation, une hygiène inadéquate et aucun accès au traitement médical, en plus du fait que des enfants étaient détenus en compagnie d’adultes. [4] Le droit des femmes de vivre libres de violence et de discrimination en Haïti, OEA/SER.L/V/II.doc 64, 10 mars 2009, sera abordé plus en détail dans la section C.3. [5] Voir, Rapport CIDH nº9/07, P945/05, Recevabilité, Johel Dominique (Haïti), 28 février 2007, paras.24-26; Rapport CIDH nº65/06, P81/06, Recevabilité, Jimmy Charles (Haïti), 20 juillet 2006, paras.23-25; Rapport CIDH nº64/05, P445/05, Recevabilité, Yvon Neptune (Haïti), 12 octobre 2005; Rapport CIDH nº 19/04, P975/03, Recevabilité, Ephraïm Aristide (Haïti), 26 janvier 2004; Rapport annuel 2001 de la CIDH, Rapport nº129/01, Affaire nº12.389, Jean Michel Richardson (Haïti), paras. 11 et seq. CIDH, Rapport nº 79/03, P139/02, Guy A. François (Haïti), paras. 10 et seq. [6] Cour I/A des DH, Affaire Velásquez Rodríguez, jugement du 29 juillet 1988, série C, nº4, paras.135 et 136; CIDH, Rapport nº 28/96, Affaire 11.297, Juan Hernández (Guatemala), 16 octobre 1996, para.43. [7] Entre autres, la Première ministre haïtienne du moment, Mme Pierre-Louis, la Secrétaire d’État américaine, Mme Hillary Clinton, la Ministre de la Coopération du Canada, Mme Beverly Oda, le Secrétaire général des Nations Unies, M. Ban Ki-Moon, le président de la Banque interaméricaine de développement (BID), M. Luis Alberto Moreno, le directeur général du Fonds monétaire international, M. Dominique Strrauss-Kahn, et le président de la Banque mondiale, M. Robert Zoellick. [8] Institut de la paix des États-Unis, Rapport spécial 232, Haïti après la Conférence des donateurs, Une voie vers l’avant, septembre 2009. [9] Fonds monétaire international, « Le FMI et la Banque mondiale approuvent un allègement de la dette de 1,2 milliard $US pour Haïti », Communiqué de presse no 09/243, 1er juillet 2009. [10] La délégation était composée de représentant de huit États membres de l’OÉA ainsi que de hauts fonctionnaires de la BID, de l’OPS, de l’IICA et de la Fondation panaméricaine de développement. [11] Caribbean News Network, « Mission interaméricaine de haut niveau en Haïti, un succès », 10 septembre 2009. [12] Voir, Le Nouvelliste, « Le choix de Bellerive ratifié », 6 novembre, 2009; et le Miami Herald, « Bellerive nommé au poste de Premier ministre d’Haïti », 9 novembre 2009. [13] Voir, par exemple : RNDDH, Indicateur de Droits Humains Numéro 15, 2009; et « Rapport de l’expert indépendant sur la situation des droits de la personne en Haïti », Doc. ONU. A/HRC/11/5, 26 mars 2009. [14] “Rapport de la Mission du Conseil de sécurité en Haïti”, Doc. ONU S/2009/175, 3 avril 2009, para.27. [15] Réunion avec des ONG à Port-au-Prince, 25 mai 2009; « Après une longue période d'accalmie, Port-au-Prince semble redevenir le théâtre d'attaques d'individus armés », Radio Métropole, 20 octobre 2009. [16] Information présentée lors des audiences de la CIDH tenues le 3 novembre 2009, par le Collectif de Notables de Cité Soleil (CONOCS). [17] Voir, par exemple, Commission Nationale Justice et Paix (JILAP) « Violence dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, Jiyè – out – sektanm 2009 », 18 octobre 2009, qui identifie au moins 18 victimes de justice populaire ou lynchage seulement entre juillet et septembre 2009. [18] Inter alia: L’expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de la personne en Haïti, Michel Forst, déclare qu’ “aujourd’hui, la réforme de la police est visible, la population s’en rend compte et commence à montrer plus de confiance à l’égard de l’institution, mais des cas de corruption existent encore au sein de la PNH” Haiti Press Network, 4 septembre 2009. [19] Réunion avec des ONG à Port-au-Prince, 25 mai 2009; visite du Pénitencier national et entrevue avec des détenus et des gardes, 29 mai 2009. [20] Réunion avec des ONG à Port-au-Prince, 25 mai 2009. [21] Réunion avec des ONG à Port-au-Prince, 25 mai 2009. [22] Ministère de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle (MENFP). [23] Au sein du Sénat, le bureau des sessions a été reconduit sans vote à l’automne 2008, après qu’aucun des nouveaux candidats n’ait pu obtenir une majorité. Ceci a engendré des tensions au sein du Sénat, dont le fonctionnement a par ailleurs sérieusement été restreint du fait que seuls 18 des 30 sièges étaient occupés depuis mai 2008. Et de ce fait, il y a eu plusieurs tentatives infructueuses de tenir des séances au Sénat vu que le quorum de 16 sénateurs ne pouvait pas être obtenu. Conseil de sécurité des Nations Unies, Rapport du Secrétaire général sur la Mission de stabilisation des Nations Unies en Haïti, S/2009/129, 6 mars 2009. [24] Le CEP a lancé le processus d’enregistrement pour les partis politiques et les candidats le 28 novembre 2008. Le 6 janvier, le CEP a publié une liste de 33 partis politiques autorisés à se présenter aux élections, y compris Fanmi Lavalas (parti de l’ancien président Aristide). Le 23 janvier 2009, lorsque le processus d’enregistrement des candidats s’est terminé, 105 candidats s’étaient inscrits pour les élections, y compris un total de 16 candidats pour Fanmi Lavalas, citant l’autorisation de deux groupes dirigeants au sein du parti. Le 5 février, le CEP a approuvé 65 des 105 candidats inscrits pour ces élections sénatoriales partielles, mais a invalidé 40 candidats, y compris tous ceux qui avaient été présentés par les deux factions de Fanmi Lavalas, ainsi que sept des neuf candidats que les organisations de défense des droits de la personne avaient accusé de manquer de l’intégrité nécessaire pour être considérés comme appropriés pour ces postes. Le CEP a justifié sa décision d’exclure tous les candidats de Fanmi Lavalas pour non respect de la Loi électorale (obtention d’une liste unique consolidée de candidats autorisée et signée par le chef officiel du parti, Jean-Bertrand Aristide, qui vit en exil en Afrique du Sud). Par conséquent, les partisans de Fanmi Lavalas ont appelé au boycott général des élections. [25] Bulletin d’information VNU no 23, mai 2009; MINUSTAH Press, “Vers des élections sans violence?”, 22 juin 2009; Haiti Press Network, « Haïti-Élections: le CEP publie les résultats des sénatoriales », 29 juin 2009. [26] Voir notamment: Communiqué de presse E-140 de l’OEA, Haïti: “Insulza souligne l’effort du gouvernement haïtien et condamne les actes de violence”, 21 avril 2009; et MINUSTAH, Communiqué de presse no 391, 21 juin 2009. [27] Voir notamment: Cour I/A des DH, Affaire Yatama, par. 194; Cour I/A des DH, Affaire Castaneda Gutman c. le Mexique, jugement du 6 août 2008, Ser.C no184. [28] Rapport de la Mission du Conseil de sécurité en Haïti (11 au 14 mars 2009), 3 avril 2009, Doc ONU S/2009/175. [29] Par exemple, Le BAI dénonce la multiplication des cas d’arrestations et de détention à l’occasion de manifestations de rues, AHP, Port-au-Prince, 25 août 2009; « Haïti / Salaire minimum : La mobilisation continue pour libérer deux étudiants » Alter Presse, 25 août 2009. [30] Haiti Press Network, 27 août 2009. [31] Service d’information des Nations Unies, « Haïti : La MINUSTAH condamne une attaque armée contre un juge à Port-au-Prince », 28 septembre 2009. [32] “Aidez Haïti à garder les drogues hors du pays”, 7 mars 2009, Mark Schneider, International Crisis Group, en ligne: www.crisisgroup.org/home/index.cfm?id=5982&1=1.
[33]
Haiti Press Network, 22 septembre 2009; Communiqué de presse,
Répressions à l’encontre des journalistes à Port-de-Paix, CARLI,
26 septembre 2009; Haïti Progrès, 28 septembre 2009; Haitian Times,
octobre 2009, Press Freedom Is Improving, Group Says, disponible en
ligne au: [34] Radio Idéal a été fermée le 18 septembre. [35] AHP, Port-au-Prince, 21 septembre 2009; Haiti Press Network, 22 septembre 2009; Communiqué de presse, Répressions à l’encontre des journalistes à Port-de-Paix, CARLI, 26 septembre 2009; Haïti Progrès, 28 septembre 2009. [36] Radio Métropole Haïti, 29 septembre 2009 ; Reporters sans frontières/IFEX, 14 avril 2009, Government orders reopening of provincial radio station, disponible en ligne au: http://www.ifex.org/haiti/2009/04/16/radio_station_reopened/. Reporters sans frontières/IFEX, 9 avril 2009 Radio station closed for refusing reveal sources, disponible au: http://www.ifex.org/haiti/2009/04/09/id_ale_fm_radio_station_closed/. Radio Kisekeya, 13 avril 2009, Radio Idéale FM recommence à émettre, disponible en ligne au : http://radiokiskeya.com/spip.php?article5824 [37] Voir, inter alia, Cour I/A des DH, Ricardo Canese c. Paraguay, 31 août 2004, Ser. C no111, par.77; Cour I/A des DH, Affaire Herrera Ulloa (La Nación) c. Costa Rica, 2 juillet 2004, Ser. C no107 par.108; Cour I/A des DH, Ivcher Bronstein c. Pérou, 6 février 2001, Décision sur le fond, Ser. C no74, para.146; Cour I/A des DH, Avis consultatif, Adhésion obligatoire à une association prescrite par la loi pour la pratique du journalisme (articles 13 et 29 de la Convention américaine), 13 novembre 1985, OC-5/85 Ser. A no 5, para.30. [38] Cour I/A des DH, Avis consultatif, Adhésion obligatoire à une association prescrite par la loi pour la pratique du journalisme (articles 13 et 29 de la Convention américaine), 13 novembre 1985, OC-5/85 Ser. A no 5, para.30. [39] Société de presse interaméricaine, 65e assemblée générale, 6 au 10 novembre 2009, Rapport de pays pour Haïti, Disponible au: http://www.sipiapa.com/v4/index.php?page=det_informe&asamblea=24&infoid=378&idioma=sp; Haitian Times, octobre 2009, « Press Freedom Is Improving, Group Says », disponible au : http://www.haitiantimes.com/pages/full_story/push?article-Press+Freedom+Is+Improving-+Group+Says-%20&id=4159145&instance=news_special_coverage_right_column. [40] Rapport annuel de la CIDH, Chapitre IV, 2007, para.192. [41] Loi portant sur le Statut de la Magistrature, Loi sur l’École de la Magistrature et Loi créant le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, 20 décembre 2007. [42] Information fournie par des représentants de l’État au cours des audiences tenues le 3 novembre 2009. [43] À cet égard, la CIDH note l’information reçue concernant la suspension du juge Fritzner Fils-Aimé pour « soupçons de corruption », qui était en charge de l’enquête sur le meurtre du journaliste Jean Dominique. Deux des juges précédents en charge de cette affaire ont été suspendus pour raisons similaires. Le juge Fils-Aimé était le sixième juge en charge de l’affaire depuis l’assassinat de M. Dominique en avril 2000 : Reporters sans Frontières / IFEX, 2 avril 2009, « Haiti: Judge in charge of Jean Dominique Murder case suspended for corruption », disponible en ligne au: http://www.ifex.org/haiti/2009/04/03/judge_in_jean_dominique_murder; Radio Kiskeya, 10 avril 2009, « Le juge d’instruction en disponibilité Fritzner Fils-Aimé dénounce un attentat contre sa personne », disponible en ligne au: http://radiokiskeya.com/spip.php?article5819 [44] Information fournie par des représentants de l’État au cours des audiences tenues le 3 novembre 2009. [45] Voir par exemple, « Rapport de la CIDH sur la situation des droits de la personne au Chili », OEA/Ser.L/V/II.66, doc. 17, 1985, Ch. VIII, para. 139; et CIDH, « Haïti: justice en déroute ou l’état de droit? Défis pour Haïti et la communauté internationale », OEA/Ser/L/V/II.123, doc.6 rev 1, 26 octobre 2005, para.154. [46] AlterPresse, 14 août 2009; Plate-forme Haïti de Suisse (PFHS), Transparency International Suisse, Communiqué de presse, « Des ONG saluent la dernière décision prise dans le cas Duvalier », 14 août 2009. [47] Réunion avec la MINUSTAH, 25 mai 2009. [48] Cour I/A des DH, Palamara Iribarne c. Chili, Jugement du 22 novembre 2005, (Bien-fondé, réparations et dépens) Ser.C.no118, para. 50. [49] Voir également Cour Eur. DH, Golder c. le Royaume-Uni, Jugement du 21 février 1975, Ser.A, no18, paras. 28-36; et Cour Eur. DH, Baskiene c. Lituanie, Jugement, 24 juillet 1975, paras. 78-79. [50] Cour I/A des DH, Affaire Yvon Neptune c. Haïti, Jugement du 6 mai 2008 (Bien-fondé, réparations et dépens), Ser.C no180, para. 83. [51] “Haïti: justice en déroute ou l’état de droit? Défis pour Haïti et la communauté internationale”, CIDH, OEA/Ser/L/V/II.123, doc.6 rev 1, 26 octobre 2005. [52] Voir, inter alia, Amnistie Internationale, “Haïti: Les arrestations illégales et arbitraires se poursuivent tandis que le climat de violence politique met à mal les droits humains,” AMR 36/056/2004, 19 octobre 2004; Human Rights Watch, Rapport mondial, Haïti, Événements de 2008, disponible sur le site http://www.hrw.org/en/node/792144; Rapport annuel 2007 de la CIDH, aux paras.117-120; et Rapport annuel 2007 du CICR, 295-299, disponible sur le site http://www.icrc.org/Web/Eng/siteeng0.nsf/htmlall/7EUETB/$FILE/icrc_ar_07_haiti.pdf?OpenElement [53] Titre original, en français. [54] Cour I/A des DH, Affaire Yvon Neptune c. Haïti, Jugement du 6 mai 2008 (Bien-fondé, réparations et dépens), Ser.C no180, paras. 105-107. [55] L’article 5(4) de la Convention américaine stipule que “Les prévenus doivent être, sauf dans des circonstances exceptionnelles, séparés des condamnés, et soumis à un régime approprié à leur condition de personnes non condamnées”; Article 10, para. 2(a), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. De même, le huitième principe de l’Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement (adopté par l’Assemblée générale dans sa résolution 43/173, du 9 décembre, Principe 8) indique que: Les personnes détenues sont soumises à un régime approprié à leur condition de personnes non condamnées. Elles sont donc, chaque fois que possible, séparées des personnes emprisonnées; de même, le paragraphe 8 de l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus, adopté par le premier Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, tenu à Genève en 1955 et approuvé par le Conseil économique et social dans ses résolutions 663 C (XXIV) du 31 juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13 mai 1977, la règle 8 stipule que: Les différentes catégories de détenus doivent être placées dans des établissements ou quartiers d'établissements distincts, en tenant compte de leur sexe, de leur âge, de leurs antécédents, des motifs de leur détention et des exigences de leur traitement. Ainsi: […] (b) Les détenus en prévention doivent être séparés des condamnés. [56] Cour I/A des DH, Tibi c. Équateur, Jugement du 7 septembre 2004 (Objections préliminaires, bien-fondé, réparations et dépens), Ser.C no114, para. 158; et Cour I/A des DH, Cas López Álvarez c. Honduras, Jugement du 1er février 2006 (Bien-fondé, réparations et dépens), Ser.C no141, paras. 111-112; voir également, Cour I/A des DH, Cas Montero Aranguren et al. (Centre de détention Catia) c. Venezuela, Jugement du 5 juillet 2006 (Objections préliminaires, bien-fondé, réparations et dépens), Ser.C no 150, para. 104. [57] Cour I/A des DH, Affaire Yvon Neptune c. Haïti, jugement du 6 mai 2008 (Bien-fondé, réparations et dépens), Ser.C no180, para.146. [58] RNDDH, Réforme carcérale et Droits des Personnes Incarcérées, pages 8 et 26; visite à la prison de Pétionville, 26 mai 2009; et visite au Pénitencier national, 29 mai 2009. [59] Communiqué de presse, Quand le Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique se dédouane des problèmes liés au mauvais fonctionnement du système judiciaire haïtien, CARLI, Port-au-Prince, 22 juin 2009. [60] Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus, adopté par le premier Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, tenu à Genève en 1955 et approuvé par le Conseil économique et social dans ses résolutions 663 C (XXIV) du 31 juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13 mai 1977, Règle 8. [61] Voir notamment, “Haïti: justice en déroute ou l’état de droit? Défis pour Haïti et la communauté internationale”, CIDH, OEA/Ser/L/V/II.123, doc.6 rev 1, 26 octobre 2005, paras.205 et seq.; Rapport annuel 2007 de la CIDH, chap. IV, paras.198-201; et Rapport annuel 2008 de la CIDH, chap. IV, paras. 287-291. [62] Cour I/A des DH, Affaire Yvon Neptune c. Haïti, Jugement du 6 mai 2008 (Bien-fondé, réparation et dépens), Ser. C no180, para. 137. [63] Communiqué de presse, SOS aux Membres d’Amnesty International, Organisation mondiale contre la torture (OMC), fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et Human Rights Watch, Port-au-Prince, 21 mai 2009. [64] Voir Réseau National de Défense des Droits Humains, “Radiographie des prisons du pays”, octobre 2009; Center for Social Justice, Seton Hall University School of Law, Partenariat Hastings - Haïti (HHP) à U.C. Hastings College of the Law, concernant les conditions de détention à Jérémie; et Bulletin d’information UNV, 5 mars 2009, relativement aux conditions à Miragoâne. [65] Cour I/A des DH, Neira Alegría et al. c. Pérou, Jugement du 19 janvier 1995, (Bien-fondés) Ser. C no20, para. 60; la Prison Miguel Castro-Castro c. Pérou, Jugement du 25 novembre 2006 (Bien-fondé, réparations et dépens), Ser. C no160, para. 315; et Montero Aranguren et al. (Centre de détention de Catia) c. Venezuela, Jugement du 5 juillet 2006 (Bien-fondé, réparations et dépens) Ser. C no150, paras. 85 et 87; et Cour I/A des DH, Affaire Yvon Neptune c. Haïti, Jugement du 6 mai 2008 (Bien-fondé, réparation et dépens), Ser. C no180, para.130. [66] Rapport de la CIDH « Rapport sur la situation des défenseurs des droits de l’Homme dans les Amériques », OEA/Ser.L/VII.124, doc. 5 rev.1, 7 mars 2006, para. 20. [67] MC 5/09 – X, Haïti, le 17 avril 2009, la CIDH a octroyé des mesures conservatoires pour six personnes en Haïti (leur identité est gardée confidentielle à la demande des requérants). La requête demandant les mesures conservatoires prétend que ces personnes ont été les cibles de menaces et d’agressions de la par d’agents de sécurité de l’État depuis 2008. Il est également allégué que le père d’un des bénéficiaires de ces mesures a été tué le 28 mars 2009. La Commission interaméricaine a demandé à l’État d’Haïti d’adopter les mesures nécessaires pour garantir la vie et l’intégrité physique des bénéficiaires, et d’informer la CIDH des actions prises pour enquêter, par le biais du pouvoir judiciaire, sur les faits qui ont mené à l’adoption des mesures conservatoires; et MC 276-09 – R.S., A.B. et al., Haïti, le 14 octobre 2009, la CIDH a accordé des mesures conservatoires pour R.S.et son enfant de 12 ans, A.B., ainsi que cinq membres d’une organisation de droits de la personne en Haïti (leur identité est gardée confidentielle à la demande des requérants). La requête demandant les mesures conservatoires prétend qu’A.B. a été violée en janvier 2009 par un employé de l’école, et qu’A.B. et sa mère sont la cible de menaces et d’actes de violence à cause des plaintes qu’elles ont déposées suite au viol. De leur côté, les cinq membres de l’organisation de droits de la personne susmentionnée ont également fait l’objet de menaces téléphoniques et de harcèlement au cours des derniers mois, en raison de l’appui psychologique et juridique qu’elles ont accordé à A.B. et à sa mère. Il est également allégué que le 25 avril 2009, la résidence de R.S. a été mise à feu par des individus fortement armés. Selon les requérants, les actes de violence auxquels ils sont soumis ont été exécutés par un agent de police local, qui est apparemment le frère du professeur qu’ils accusent d’avoir violé A.B. La Commission interaméricaine a demandé à l’État d’Haïti d’adopter les mesures nécessaires pour garantir la vie et l’intégrité physique des bénéficiaires, et d’informer la CIDH des actions prises pour enquêter, par le biais du pouvoir judiciaire, sur les faits qui ont mené à l’adoption des mesures conservatoires, voir http://www.cidh.oas.org/medidas/2009.eng.htm. [68] À ce titre, la CIDH met en valeur la création de la “Concertation nationale contre les violences à l’égard des femmes”, un espace de coordination qui traite de la violence envers les femmes et rassemble les ministères de la Condition Féminine et des Droits des Femmes, de la Justice et de la Santé publique, des organisations spécialisées de la société civile et des organes pertinents de la MINUSTAH et des Nations Unies. [69] Le droit des femmes de vivre libres de violence et de discrimination en Haïti, OEA/SER.L/V/II.doc 64, 10 mars 2009. [70] Pour consulter le rapport complet: http://www.cidh.oas.org/countryrep/Haitimujer2009fr/HaitiWomen09.toc.fr.htm [71] Réunion avec des ONG à Port-au-Prince, 25 et 28 mai 2009; réunion avec des représentants du Ministère des Affaires sociales, 29 mai 2009. [72] Réunion de travail avec des représentants de l’AGREDAH (Action Gonaïvienne pour le Développement et pour le Respect des Droits Humains), 4 novembre 2009. [73] Selon un rapport du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) “Radiographie des prisons du pays” octobre 2009, page 9, en date du 13 octobre 2009, 190 garçons étaient détenus au Centre Delmas 33, ce qui représente 0,61 m2 pour chaque garçon. [74] Centre de justice sociale, Seton Hall University School of Law, Partenariat Hastings - Haïti (PHH) à U.C. Hastings College of the Law. [75] Selon le communiqué de presse PNUD, Le PNUD et la MINUSTAH : un partenariat solide favorisant la justice des mineurs, Haïti, Cap-Haïtien, 7 août 2009. [76] Loi du 7 septembre 1961 instituant des tribunaux spéciaux pour enfants, article 23. [77] Réunion avec des juges du Tribunal pour Enfants, Port-au-Prince, 28 mai 2009. [78] Réunion avec des juges du Tribunal pour Enfants, Port-au-Prince, 28 mai 2009. [79] Communiqué de presse des Nations Unies, Expert des Nations Unies sur l’esclavage exprime sa préoccupation au sujet du système ‘Restavek’ en Haïti, 10 juin 2009. [80] Le Secrétaire général des Nations Unies signale que “la violence sexuelle, y compris les viols en bandes, perpétrée par des éléments armés à l’encontre des enfants dans le contexte de l’’insécurité et de l’impunité continue d’être mise en évidence”, Enfants et conflits armés, Rapport du Secrétaire général, Doc. ONU A/63/785 S/2009/158, 26 mars 2009, para.57. [81] Réunion avec des ONG à Port-au-Prince, 28 mai 2009. [82] Conseil national de la sécurité alimentaire, septembre 2009. [83] Conseil de sécurité de l’ONU, Rapport de la Mission du Conseil de sécurité en Haïti, Doc. ONU S2009/175, 3 avril 2009. [84] Le FMI déclare qu’“à mesure que l’économie se remet des effets dévastateurs des ouragans de l’année dernière et que le prix de la nourriture et du carburant grimpe, Haïti est frappé par la crise mondiale”, Fonds monétaire international, Haïti, Cinquième revue de l'accord triennal au titre de la facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance, et Demandes de renonciation aux critères de performance, Modification des critères de performance, et extension de l’accord, 15 juin 2009. [85] Institut de la Paix des États-Unis, Haïti après la Conférence des donateurs, un chemin vers l’avant, rapport spécial 232, septembre 2009. [86] Communiqué de presse du PNUD, En Haïti, mieux vaut un salaire bas que pas de salaire du tout, Corey Flintoff, Port-au-Prince, 18 juin 2009; et Institut de la paix des États-Unis, Haïti après la conférence des donateurs, une voie vers l’avant, Rapport spécial 232, septembre 2009. [87] Information présentée au cours des audiences de la CIDH tenues le 3 novembre 2009, sur la base d’un sondage mené par l’ONG Collectif des Notables de Cité Soleil (CONOCS). [88] AlterPresse, 5 octobre 2009, se réfère à des données de l’Institut Haïtien de Statistique et d'Informatique, qui indiquent que la population de Gonaïves a passé de 318 755 habitants en juin 2008 à 263 716 en octobre 2009. [89] À ce sujet, voir « Plaidoyer en vue de la ratification du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels par Haïti », Bureau du Haut-Commissaire aux droits de l’Homme, à: http://minustah.org/pdfs/sdh/PLAIDOYER_PIDESC.pdf. [90] Réunion avec des ONG à Port-au-Prince, 25 mai 2009, information fournie par le Groupe d'Appui aux Rapatriés & Réfugiés (GARR). [91] Réunion avec des ONG, Port-au-Prince, 25 mai 2009. [92] Voir, « Lettre ouverte aux autorités haïtiennes autour de la campagne haineuse perpétrée contre les Haïtiens/nes et leur pays en République dominicaine », Communiqué de presse GARR, 21 octobre 2009 ; « Un ressortissant haïtien décapité en République dominicaine », Le Nouvelliste, 22 octobre 2009; voir aussi « L'ambassadeur dominicain condamne l'assassinat de 4 ressortissants haïtiens », Radio Métropole, 23 octobre 2009; et « Les autorités haïtiennes et dominicaines doivent agir pour prévenir de nouveaux assassinats contre les migrants/es haïtiens », Communiqué de presse GARR, 28 octobre 2009. [93] Telles les Îles Turques et Caïques, où des rapports indiquent que quelque 13 000 Haïtiens vivent, mais seulement 3 000 d’entre eux en situation régulière : « Les migrants/es haïtiens en difficulté aux iles Turques et Caïques » Communiqué de presse GARR, 2 septembre 2009. |